Mélusine et Morgane

 

 

Il était une fois
Une très vieille histoire
Qu’on contait aufrefois
A carême aux longs soirs
 
Il faut qu’on s’en souvienne
Dit la vieille conteuse
Pour qu’elle ne survienne
A d’autres malheureuses
 
Morgane et Mélusine
N’étaient pas orphelines
Elles avaient père et mère
Qui vivaient sans mystères
 
Connues dans le village
Comme des filles sages
Elles cueillaient les sourires
Sans souci des oui-dire
 
Cueillaient aussi la sauge
Le thym et l’ellébore
Le soleil à son auge
Baignait tous leurs efforts
 
Elles savaient le secret
Des plantes qui guérissent
Des maux qu’elles emportaient
Vers de meilleurs auspices
 
Quand de la capitale
Vint l’homme cardinal
Qui voulut avec elles
Allumer sa chandelle
 
Au fond de la chapelle
Tout net elles refusèrent
Les petits jeux charnels
Que proposait le père
 
L’autorité suprème
Fut remplie de colère
Leur jeta l’anathème
En disant ses prières
 
Sus donc à ces sorcières 
Car elles sont du démon
L’incarnation première
A mort ! Pas de pardon !
 
Foule ignare et crédule
Oublia leurs bienfaits
Les jeta en cellule
Pour expier leur forfait
 
Elles eurent beau nier
Leur pacte avec le diable,
Quelqu’un prit leur défense
Fut réduit au silence,
 
Elles eurent beau crier
Qu’elles n’étaient pas coupables
Nul, ni rien n’empêcha
Le drame, on les brûla.
 
Perdues dans le village
Errent encore les âmes
De ces deux filles sages
Mélusine et Morgane